les leçons de la Covid-19

Si l’eau est traitée, c’est qu’il y a de bonnes raisons. Si l’eau tue et beaucoup plus que le SARS COV-2, c’est aussi qu’il y a des raisons: c’est un terrain de jeu propice aux bactéries et virus. Hépatite, choléra etc.

Ce préambule est important pour mettre en perspective ce qui suit et rappeler la chance que nous avons en Europe de pouvoir considérer comme acquis d’avoir de l’eau potable au robinet à tout moment de la journée. 

Le secteur de l’eau a été impacté par la Covid 19. Il y a les impacts classiques sur le travail etc. Qu’avons nous de plus spécifique? mises en place de plans de continuation d’activité d’un des secteurs les plus stratégiques, surveillance accrue des qualités des eaux, dévolution modifiée des boues en cas de détection de trace de Covid-19 (pas d’épandage) notamment. Quels enseignements pouvons-nous tirer de cet épisode coronavirus? J’en distingue trois autour des thèmes de la performance, du paradoxe de la fragilisation et de la relance.

Enseignement 1: nous bénéficions d’une infrastructure très fiable et résiliente et d’opérateurs très compétents. A aucun moment je me suis inquiété de savoir si j’allais avoir de l’eau au robinet et pouvais continuer à la boire. Les traitements marchent et les organisations (tant les Veolia et consorts que les régies) sont compétentes pour assurer la qualité de service même en temps de pandémie. 

Par ailleurs aucun industriel n’a été impacté pour des raisons liées à l’eau. La seule contrainte qui est toutefois de taille: les boues de certaines stations d’épuration n’ont pu être épandues par mesure de précaution sanitaire. Ca renchérit le coût de dévolution des boues.

Enseignement 2: le secteur de l’eau se retrouve néanmoins fragilisé en étant une victime collatérale de la décélération très brutale de l’activité industrielle. En effet, aucune activé ne se fait sans utilisation d’une façon ou d’une autre d’eau. Comme c’est un secteur où les couts fixes priment sur les couts variables, toute la filière est en tension et sollicite le Premier Ministre pour mettre en place des solutions financées par les Agences de l’Eau. On parle de 500 million d’euros.

Enseignement 3: à toute crise il y a des opportunités. La relance peut permettre d’une part d’améliorer encore la performance de notre infrastructure et contribuer à préserver la ressource, enjeu croissant avec le changement climatique. Comment? C’est le moment de prendre des risques et d’investir sur certaines technologies qui peuvent rendre le traitement de l’eau plus sobre (moins consommateur d’énergie et de produits chimiques) ou améliorer le rendement de nos réseaux (>20% pertes aujourd’hui) ou réutiliser l’eau sur le modèle de l’économie circulaire (une directive européenne de mai dernier permet de nouveaux usages).  Je ferais aussi du smart network avec les réseaux d’assainissement. Ils peuvent nous fournir un ensemble de données très précieux sur beaucoup de sujets à commencer par la Covid 19. En effet, étude réalisée par Eau de Paris montre qu’on peut détecte dans les eaux usées des traces du génôme du SARS-Cov-2 avant que des cas soient diagnostiqués. Michaël Piron, serial entrepreneur dans l’eau, développe en partenariat avec une université prestigieuse une solution de détection en ligne.  En d’autres termes, on doit pouvoir identifier un cluster avant que les premiers symptômes apparaissent sur les personnes. Plus largement, faire parler les eaux usées peut nous dire beaucoup sur nos consommations et habitudes (bonnes et mauvaises!) et être une source d’informations très riche pour nos politiques publiques.

En conclusion, l’eau a besoin d’un coup de pouce qui restera beaucoup moins gourmand que des filières type automobile. Ce coup de pouce permettra non seulement de renforcer une infrastructure déjà fiable mais aussi de répondre aux enjeux majeurs de la ressource (usage et qualité) et ce quelques soit la filière industrielle et particulière.